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En Irak, les enquêteurs de l’ONU sur les traces des crimes de masse de l’organisation Etat islamique

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En Irak, les enquêteurs de l’ONU sur les traces des crimes de masse de l’organisation Etat islamique
Cérémonie organisée à l’occasion du retour des dépouilles des victimes Yezedi à Kocho (Irak), en février 2021.

1006, 1109, 0614… Des dizaines de mots de passe, craqués en quelques secondes, défilent sur l’écran d’un ordinateur du laboratoire. L’expert forensique peut enfin accéder au cœur des téléphones mobiles retrouvés sur le champ de bataille et révéler les secrets de l’organisation Etat islamique (EI) cachés dans les cartes SIM. « Le jeu, maintenant, c’est de les faire parler ! », explique Adrien, qui souhaite garder l’anonymat pour des raisons de sécurité. Au cœur de la zone verte à Bagdad, le secteur extremely-protégé de la capitale irakienne, ce laboratoire significant-tech a des airs de Bureau des légendes.

L’équipe scientifique des Nations unies y traite « les preuves tangibles » des crimes commis par l’EI lors de l’occupation du nord et de l’ouest de l’Irak, de 2014 à 2017. Téléphones mobiles et disques durs portent les traces laissées par les auteurs des massacres qui ont endeuillé le pays et terrifié le monde. C’est la première véritable enquête high-tech sur des crimes de masse. Aux preuves électroniques s’ajoutent les centaines de témoignages collectés par les 6 équipes d’enquête sur le terrain, les analyses balistiques et celles tirées de l’exhumation des charniers. Au moins 202 fosses communes ont été découvertes par l’ONU, comme de sinistres cailloux blancs posés sur la route de l’organisation terroriste.

En septembre 2017, le Conseil de sécurité des Nations unies votait à l’unanimité la mise sur pied d’une équipe d’enquête (Unitad) chargée de recueillir, conserver et stocker les preuves de crimes contre l’humanité, crimes de guerre et génocide commis en Irak par l’EI. Le mandat dépasse la very simple mission d’établissement des faits. C’est une véritable enquête judiciaire. Durant deux semaines, ses enquêteurs ont ouvert leurs portes au Monde et partagé leur quotidien sur une scène de crimes de quelque 56 000 km2.

Rassembler des preuves

A « la villa », l’une des anciennes résidences du sinistre Oudaï, fils aîné de Saddam Hussein et as de cœur du jeu de cartes créé par les Américains lors de la traque des figures du régime après l’invasion de 2003, le benjamin de l’équipe doit travailler sur « des preuves de champ de bataille ». Adrien nettoie les connecteurs d’un disque dur obstrué par de la terre et du sang. « Toute la connectique est complètement défoncée, observe l’expert forensique. Il a pu être dans une maison qui a explosé ou à l’arrière d’une voiture qui a servi dans des attaques. Ici, on extrait des informations sur des ordinateurs qui ont dix ans, qui ont passé leur vie sous 50 degrés et dans la poussière. »

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